Les Prophéties du Tigre blanc de Marc-Louis Questin : un manifeste post-surréaliste ?

Les Prophéties du Tigre blanc de Marc-Louis Questin : un manifeste post-surréaliste ?

Les Prophéties du Tigre blanc, du Marc-Louis Questin, éditions unicité, 360 pages, 2018.

 

 » La médiocrité de notre univers, s’interrogeait André Breton, dans son Introduction au discours sur le peu de réalité, ne dépend-elle pas essentiellement de notre pouvoir d’énonciation ? »

Une telle question montre qu’un véritable écrivain s’intéresse forcément aux problèmes du langage.

Un intérêt pas seulement styliste, mais cognitif et philosophique.

 

Questionnement repris par Marc-Louis Questin dans ce texte défiant les étiquettes:

 » Qui pourra dire alors la part exacte de réalité, voire d’autobiographie dans cette démarche si atypique? La réponse est d’emblée contenue dans la question. Les formes expriment l’inaccessible ».( p.57)

 

Poète avant tout, l’auteur cherche à échapper au carcan de la « pensée surveillée ».

Pour lui, le « langage est un cygne aux prunelles scintillantes ».(p.321) C’est pourquoi veut-il écrire sans contraintes et sans sujet préconçu. Marc-Louis extériorise ses rêves sous forme de vers et d’aphorismes teintés de bouddhisme :

 » Vêtu de noir, l’homme du courage. destin secret d’aventurier. Le Maître ici est en toi-même ».

 

Toutefois, peut-on parler d’écriture automatique ?

Personnellement, je ne le crois pas. Ce livre joue avec les codes de l’autobiographie et du récit poétique comme Aurora de Michel Leiris, mais reste le fruit d’une élaboration consciente. L’écrivain l’avoue à la fin de son livre: »(l)a conscience illumine la matière temporelle ». (p.342)

Philosophiquement, Marc-Louis procède comme les surréalistes à un retour à la perception immédiate, d’où l’impression de décryptage à faire pour le lecteur pris dans une « alchimie neurologique et sémantique du labyrinthe ».

En se lançant dans l’aventure de ce texte, sur la piste du tigre blanc, Marc-Louis renoue avec l’expérience surréaliste où se manifeste l’insuffisance du monde. Epris d’idéal, il magnifie l’écriture, « ce fluide qui implose la conscience ». Le geste calligraphique qui lui permet d’accéder à une « identité cosmique ».

André Breton aurait été fier de cet ouvrage qui exprime la vérité d’un artiste.

 

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Mythe du centaure revisité au féminin : GLAIVE DE JAIS de Sylvie Huguet

Mythe du centaure revisité au féminin : GLAIVE DE JAIS de Sylvie Huguet

GLAIVE de JAIS de Sylvie Huguet, éditions Assyelle, 2017, 131 pages, 12 euros.

 

Pour commencer l’année 2018, quelle belle image  que ce cheval noir ailé, en première de couverture !

Echo au Pégase de la mythologie, au « noir cheval de l’ombre et de la nuit » de Victor Hugo dans La Légende des Siècles, et peut-être à l’animal mystérieux, psychopompe chez Saint-John Perse:

 » Les chevaux sont passés qui couraient à l’ossuaire, la bouche encore fraîche des sauges de la terre ». ( Chronique, II)

Il n’y a pas de romans « jeunesse  » ou « adultes » pour moi, dans le domaine initiatique, mais des degrés de lectures.

Au sens littéral, Glaive de Jais est un roman d’aventures. Anne, Ghislaine et Lucas ont treize ans et sont passionnés par les chevaux. Déjà écrivain, Anne invente un univers onirique pour ses amis. Mais ceux-ci ont envie de monter des chevaux dans la réalité… et s’inscrivent dans un club équestre. Pour l’anniversaire d’Anne, ses parents lui offrent un tableau qui va les faire basculer dans un royaume swiftien où les chevaux sont des créatures sublimes : le royaume de Roquémeraude dont le roi est un cheval noir, appelé « Glaive de Jais ». Or ce royaume est menacé par un sorcier Ugorth et ses Gorgons. On devine que les adolescents seront les Elus attendus pour combattre les forces maléfiques.

Pour le lecteur attentif au sous-titre « L’étalon qui avait perdu son âme », d’autres degrés de lecture s’offrent à nous. De quelle « âme » s’agit-il ? L’âme de l’enfance ? Car ce récit se déploie comme un hommage à l’enfance et à sa capacité d’émerveillement :

« Elle redoutait de quitter son enfance, quand Ghislaine et Lucas se précipitaient impatiemment vers l’avenir, supportait mal les transformations de son corps et craignait que ne tarît avec l’âge l’imagination que ses amis venaient de renier ».

Anne incarne la figure de l’artiste dans ce roman qui en livre un autre en creux: Portrait de l’apprentie-artiste.

L’artiste est un enfant qu’il faut apprendre à protéger de la raillerie.

L’artiste doit aussi faire des « choix » qui exigent des « sacrifices ».

L’artiste doit suivre son guide intérieur, son « Glaive de jais » pour ne pas tomber dans le piège de la mort spirituelle.

 

Face à Anne, Ghislaine et Lucas incarnent le couple de Français moyens satisfaits d’avoir une maison, des enfants…ils ne comprennent pas qu’écrire pour elle, c’est une nécessité de questionner la vie.

 

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La Fiction au service d’un travail de mémoire : analyse critique de Jean-Pierre Bacot, historien

La Fiction au service d’un travail de mémoire : analyse critique de Jean-Pierre Bacot, historien

CRITICA MASONICA

CRITICA MASONICA

Etude Critique et Académique du fait maçonnique, reflets de la revue. Envisage la Franc-Maçonnerie comme un univers culturel dont l’étude nécessite d’employer les outils des sciences humaines, de procéder à une nette séparation du réel et du légendaire et de procéder à la prise en compte de ce légendaire comme un fait social et historique.

 

Catégories : #livres

« Maria Deraismes, riche, féministe et franc-maçonne » par Fabienne Leloup

Jean-Pierre Bacot

La fiction au service d’un travail de mémoire. On ne sait pas grand-chose de ce que fut l’existence de Maria Deraismes (1828-1894), la première maçonne de l’ère moderne, co-fondatrice avec Georges Martin du Droit humain. Plutôt que de répéter ce qui s’est déjà souvent écrit, parfois aux limites de l’hagiographie, Fabienne Leloup a préféré écrire un roman, publié chez Michel de Maule, où elle met en scène la jeune fille, puis la femme riche et célibataire, laïque et bonne oratrice et, enfin, la femme mûre, trop tôt usée parce que malade (il faudra un siècle pour savoir qu’il s’agissait de la maladie de Crohn).

Si l’auteure tire le fil romanesque du côté d’un possible lesbianisme de son héroïne, lequel, s’il était avéré, ne poserait aujourd’hui aucun problème, elle insiste surtout sur les nombreuses rencontres intellectuelles qui, à la suite de l’exemple paternel, l’ont amenée à s’inscrire dans une République où il n’y avait pas beaucoup de place pour les femmes. Mais la force morale et le caractère dont était dotée Maria Deraismes lui permirent non seulement d’être reçue en janvier 1882 dans une loge de la Grande loge symbolique écossaise, mais surtout de résister au repentir de ses faux frères et d’attendre 1893 pour fonder une loge qui allait devenir une obédience internationale, le Droit humain, avec celui qui lui était resté fidèle, Georges Martin. Elle aura pu voir enfin se lever, sinon les légions de femmes qu’elle espérait en 1882, tout au moins une descendance féminine dans une logique mixte accomplissant pour la bourgeoisie le prototype des loges d’adoption construit un siècle plus tôt par et pour l’aristocratie.

Le roman de Fabienne Leloup permet de rencontrer nombre de personnages traversant les années de l’Empire libéral, puis de la IIIe République où, répétons-le, Maria Deraismes sera l’une des rares femmes à évoluer à son aise et à être acceptée dans un milieu progressiste, mais très masculin, de journalistes et de politiques. Elle y fera entendre une musique féministe assez rare dans le milieu modéré qui était le sien, proche du Parti radical. Il y eut un millier de personnes à ses obsèques civiles en février 1895. À peine avait-elle pu connaître la maçonnerie, mais elle avait déjà installé une figure tutélaire que Fabienne Leloup enrichit par un passage par la fiction. A quand une série télévisée?

 

PARTICIPATION au PREMIER SALON DU LIVRE maçonnique à NANTES le samedi 9 décembre 2017

PARTICIPATION au PREMIER SALON DU LIVRE maçonnique à NANTES le samedi 9 décembre 2017

 

Samedi 9 décembre 2017, je participerai au lancement du premier Salon du livre maçonnique à Nantes, et évoquerai de nouveau la figure de MARIA DERAISMES.

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LIEU du SALON : Manufacture des Tabacs, boulevard de Stalingrad, à 350 mètres de la gare de Nantes.

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 (Conférence prévue samedi 9 décembre à 16 h45:  » Femme dans la maçonnerie »)

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Thèmes abordés:

Initiation , imaginaire et monde moderne
Initiation , imaginaire et monde moderne
FM et BD
Symbolisme, simple interprétation ou nouveau langage
Conspirationnisme et sociétés secrètes
Femme dans la Maçonnerie