Réflexion sur un futur possible… via la ComÉDIE

Réflexion sur un futur possible… via la ComÉDIE

Si l’on se rappelle ses classiques de science-fiction, notamment Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley, la manipulation génétique permet d’assigner des rôles et des fonctions aux individus qui constitueront des castes.

La théorie de l’eugénisme née au XIXème siècle au sein de la sphère médicale a donné lieu à de vives polémiques au XXème siècle, car encouragée par les nazis ; elle sera dénoncée comme une pratique portant atteinte aux droits de l’homme.

Dans le domaine culturel, l’eugénisme a inspiré aussi des films dont le prophétique Bienvenue à Gattaca, en 1997, d’Andrew Niccol. Dans ce long métrage, les gamètes des parents sont sélectionnés de manière à pouvoir concevoir des enfants presque parfaits. Sinon ceux-ci ne seront pas habilités à assumer de grandes responsabilités, à exercer des métiers prestigieux. Or, le héros, justement a des problèmes de vue et n’a pas la taille requise pour réaliser son rêve : aller dans l’espace…

Souvent en science-fiction, le genre cyberpunk donne une vision accablante de la réalité… Parfois il est nécessaire de passer par d’autres registres. D’où le choix de traiter ce sujet sur le mode de la dérision avec cette comédie déjantée dont la première de couverture donne le ton.

Quel futur dans 25, 50, cent ans ? Le futur s’édifie avec la raison et l’imagination ( la prospective). L’humour nous engage à ne pas nous replier sur le passé, à concevoir un scénario positif, en commun.

Merci à mon complice@ Etienne Denarié, @Marie Maître, @Sabrina Pamies

à l’éditeur @Philippe Marlin

OSGHARIBYAN de Leo Kennel

OSGHARIBYAN de Leo Kennel

Editions FLATLAND

Léo Kennel alias Odile Kennel reprend le motif du labyrinthe dans ces deux récits proches du poème en prose. Les frontières entre romanesque et poétique s’abolissent pour dérouter le lecteur invité à s’identifier à la narratrice de la première novella intitulée Osgharibyan.

Le titre et les passages concernant une manifestation réprimée, semblent faire allusion à l’actualité et à une guerre aux portes de l’Europe. L’écriture visionnaire de l’écrivain trace des volutes hypnotiques autour de celui ou celle qui tente d’élucider son message.

S’agirait-il de renouveler la forme des Oracles, dans la lignée de Plutarque ?

Bien au-delà de l’onirique, perce l’inquiétude de perdre les livres et l’écriture, comme s’ils risquaient un jour de disparaître, dans les méandres de cette Ville (qui) « attend son heure ».

La seconde novella, Un oiseau de secours, nous confirmerait cette hypothèse de lecture : en grec ancien, oiseau et présage se disent de la même façon. Dans ce texte qui joue sur les pronoms, l’autrice revient sur la technique de cut-up, de collage qui lui permet de prendre au filet les mots pour délivrer ses présages et conjurer le mauvais sort:

« Et encore on a découpé, on a décomposé, on a déligné, c’est seulement après que l’écriture a pu débuter… »

Ces deux textes exaltent donc l’ambiguïté du langage humain, revendiquant les droits de la sensibilité sur la logique, rappelant la parole sibylline nécessitant une dynamique spéculative.

Pierre Bayard, vision de la littérature

Pierre Bayard, vision de la littérature

Une amie m’a offert un livre de Pierre Bayard, Comment parler des faits qui ne se sont pas produits ? ( éditions de Minuit). Cet essai fait l’éloge indirect des littératures de l’imaginaire.

Si, en tant que journaliste, il s’agit de vérifier les faits, un écrivain travaille avec le « mentir-vrai », parfois avec le merveilleux réhabilité par André Breton, quelquefois avec le fantastique, tous deux éléments provoquant un effet de surprise voire de sidération.

Avec humour, Pierre Bayard se moque des « chicaneurs », ceux qui traquent la moindre incohérence chez les auteurs, donnant l’exemple du poète Saint-John-Perse travaillant « à la construction de son propre mythe« , d’Anaïs Nin multipliant les identités et les scénarios pour « gérer au mieux … son activité d’écrivaine« .

Pierre Bayard nous montre donc qu’un écrivain recompose toujours le réel pour des raisons philosophiques ( Qui peut se targuer d’avoir accès au Réel ?), structurelles, inhérentes à la littérature.

La Littérature a besoin des archétypes et des mythes pour filtrer les événements, pour inventer des personnages, planter des décors: « savoir inventer des fictions cohérentes » permet le partage, une forme d’unité, et surtout un gage de résilience dans le monde angoissant et complexe qui est le nôtre.

Une découverte et une jubilation : un monde transparent, sans zones d’ombres, serait un monde totalitaire…

Préface : La CONSPIRATION JEANNE d’ARC de gerald MESSADIE

Préface : La CONSPIRATION JEANNE d’ARC de gerald MESSADIE

Préface

TOME 2

LA CONSPIRATION JEANNE d’ARC

Gerald Messadié écrivait dans son journal intime en 1997 : … « on ne voit en moi que le personnage. Pas la personne ». Cette réflexion nous aide à comprendre la pensée créative de l’écrivain et la cohérence de son œuvre. Dans le tome 2 de La Conspiration de Jeanne d’Arc, il s’agit plus que jamais de soulever le masque de la « personne », brouillé par des milliers d’ouvrages contradictoires.

Plus qu’au personnage, le second volume donne vie à la personne, à la femme de chair et de sang, cherchant son chemin de vie, avec droiture et détermination, envers et contre tous. Si le romancier s’intéresse à son incarnation – la « Pucelle » n’a jamais été ni une simple bergère, ni une sorcière – il lui rend ses attaches, sa famille, son corps et lui redonne la parole.

Il y a beaucoup de dialogues dans cette somme romanesque permettant l’effet de vie. Soucieux d’impulser un rythme narratif digne des meilleurs thrillers, l’écrivain a évité les lourdeurs descriptives et réussi une composition fluide entre actions et discours.

Ainsi, dans un chapitre, Jeanne expliquera pourquoi elle a toujours préféré porter des vêtements d’homme non seulement pour être libre de ses mouvements, mais pour échapper à une maternité non désirée. Par nécessité, elle a toujours refoulé ses sentiments et ses désirs. Un seul homme fait battre son cœur que le hasard ou le destin remettront sur sa route… Enlevée après sa naissance, pour préserver la dynastie des Valois contre les Anglais, élevée comme un garçon, Jeanne échappe donc aux catégories et aux codes. Aujourd’hui, elle pourrait être « gender fluid ». C’est surtout une héroïne chère à l’auteur. En creux, grâce à celle-ci, il évoque des valeurs qui lui sont consubstantielles : la liberté, l’intégrité, le sens de l’honneur jusqu’au sacrifice.

C’est là qu’intervient la force romanesque : donner à son lectorat des realia, ces détails choisis avec minutie qui nous proposent une expérience unique : voyager dans le passé et retourner au XVème siècle pour participer à un immense jeu de rôles. « Conspiration », non, conspirationnisme ! Le dessein du romancier, qui se retrouve dans toute son œuvre, est de nous inciter à revenir sur nos idées reçues sur cette période historique, particulièrement controversée.

Avec subtilité, Gerald Messadié veut nous montrer l’interaction des puissances de l’époque. Il reprend le lieu commun selon lequel la vie est un jeu, en fait ici un postulat du fait artistique et politique. Sur l’échiquier du pouvoir, la duchesse d’Anjou, Yolande d’Aragon, joue avec les blancs, les français, contre les noirs, les anglais. Elle fait tout pour empêcher que Charles VII, son gendre, le futur roi de France soit mis en échec. Jeanne d’Arc est comme le fou blanc, dans ce jeu : une pièce à trajectoire diagonale, de longue portée. C’est Yolande d’Aragon qui entretient l’armée de Jeanne d’Arc à Orléans et permet à la jeune femme de subsister. Derrière cet échiquier visible s’en superpose un autre, dissimulé : celui des puissances incognito. L’écrivain se fait historien pour décrypter le rôle essentiel des Templiers : ils auraient été les véritables financiers d’une opération politico-économique de grande envergure.

Dans le second tome de La Conspiration, l’auteur dévoile donc la manipulation des points de vue, affirmant la prééminence de l’écrivain véritable, c’est-à-dire celui qui n’est pas dupe des ruses de l’Histoire, celui qui ne se laisse pas emprisonner par les dogmes, les modes, les idéologies. Plus profondément, il nous rappelle l’importance de la mémoire et de la réflexion, à notre époque gangrenée par l’immédiateté. A contrario de certains romanciers contemporains, Gerald Messadié croit en la puissance de la narration. Même s’il se méfiait des discours amphibologiques, il a toujours pratiqué une écriture positive, nourrie de références, sensible et sensuelle.

Dans cet ouvrage, l’ultime qu’il ait écrit, l’auteur retrouve ici, avec Jeanne d’Arc, l’affirmation de la désignation, l’affirmation de la structure du langage pour sortir du chaos, l’affirmation du sens et des sens, contre l’oubli, la bêtise et l’ignorance.

Derrière la personne de Jeanne d’Arc se manifeste la tendresse de l’auteur pour cette femme à laquelle il rend hommage, en la rendant profondément humaine, loin de toutes les récupérations dont elle a été l’objet, et même la victime.

A travers l’incontournable figure de Jeanne d’Arc, enfin humanisée et non pas sanctifiée, n’est-ce pas, de la part de Gerald Messadié, le plus beau testament, celui du portrait chevaleresque de l’artiste, sans cesse en quête de vérité ?

Fabienne Leloup

Remise du Grand Prix de la CRITIQUE LITTERAIRE et des PRIX de la TRADUCTION le samedi 16 décembre 2023 À PARIS 5ÈME,

Remise du Grand Prix de la CRITIQUE LITTERAIRE et des PRIX de la TRADUCTION le samedi 16 décembre 2023 À PARIS 5ÈME,

SOUS LA PRÉSIDENCE D »ANTOINE SPIRE

AVEC LES MEMBRES DU COMTÉ DIRECTEUR, EN PARTICULIER LAURENCE PATON ET DAVID FERRE.

École Normale Supérieure

45, rue d’Ulm 75005 Paris

(salle Dussane)

Réservation obligatoire à francais.penclub@neuf.fr avant le 14 décembre.